Adrien Legendre
Biographie
Adrien Legendre est l'un des 72 savants dont le nom est inscrit sur le premier étage de la tour Eiffel. Il est le 17e, sur la face tournée vers le Nord.
Adrien-Marie Legendre, géomètre, est né à Paris, le 18 septembre 1752. Il est mort à Auteuil, le 9 janvier 1834. C'est un des plus illustres représentants des sciences mathématiques et son nom peut être inscrit à côté de ceux d'Euler, de Laplace, Monge, Lalande, Lagrange, Poinsot. Il a fait des découvertes de premier ordre et sa vie a été longue, paisible, utile, glorieuse, toute consacrée aux cultes de la pure géométrie. Issu d’une famille pauvre, il eut le bonheur d'être pris en affection par l'abbé Marie, chargé du cours de mathématiques au Collège Mazarin et de devenir, ayant terminé ses classes, le protégé de d'Alembert, qui le fit nommer professeur à l'Ecole militaire de Paris. Ayant ainsi le pain quotidien, il eut l'idée de concourir pour le prix proposé par l'Académie de Berlin en 1782. Son mémoire fut couronné. Il portait le titre : Recherches sur la trajectoire des projectiles dans les milieux résistants. L'année suivante, il présenta à l'Académie des Sciences de Paris un travail sur l'attraction des ellipsoïdes. Renvoyé à l'examen de Laplace, celui-ci déclara que le théorème de Legendre constituait un pas nouveau en géométrie, que l'analyse en était très savante et annonçait un esprit des plus distingués. L'Académie, dès l'année suivante, le désigna comme membre adjoint.
En 1787, il produit son Mémoire sur la figure des planètes, puis successivement des recherches sur les lignes géodésiques, la triangulation de la terre, les fonctions elliptiques, les intégrales particulières des équations différentielles. Enfin, en 1794, il fit paraître ses Eléments de géométrie, dont le succès fut instantané, énorme et dure toujours. L'année précédente il avait épousé une jeune fille qui l'avait caché pendant la Terreur en 1703 et qui fut pour lui une admirable compagne, aussi dévouée qu'intelligente. On doit retenir son nom, parce que Mlle Coullin continua, après la mort de Legendre à aider de sa bourse les jeunes gens que les difficultés matérielles arrêtaient dans leur carrière scientifique ; qu'elle laissa à l'Ecole polytechnique, à sa mort, en 1856, un fonds annuel pour la création de bourses, et qu'elle légua à la commune d'Auteuil la maison de son mari, payée des droits d'auteur des Eléments de géométrie, pour en faire une école.
Il est intéressant de rapporter à ce sujet un souvenir d'Arago. Le désintéressement se rencontre fréquemment chez les savants. Ce n'est presque jamais pour en profiter personnellement qu ils cherchent à amasser une modeste aisance. Mais n'ont-ils pas à songer, eux aussi, à leurs familles, aux êtres chéris qu'ils laissent en quittant ce monde ? Faut-il les priver de cette douce satisfaction dont les derniers moments de Legendre ont donné l'exemple ? Ce grand géomètre vit arriver la mort avec le sang-froid le plus remarquable. Il fit ses dernières dispositions et il s'occupa des détails de son enterrement devant sa femme et Arago avec une liberté d'esprit dont l'antiquité seule pourrait citer d'aussi beaux exemples. Arago crut, au moment où tout. était perdu sans espoir, pouvoir sans inconvenance entretenir Mme Legendre de son avenir. Il crut pouvoir l'assurer que si elle restait sans fortune, le pays certainement viendrait à son secours et que l'Académie des Sciences appuierait de toute son influence les démarches faites pour arriver à ce but. Cet entretien transmis à Legendre amena cette réponse : "Ma femme, tu feras tes remerciements à M. Arago. Je n'attendais pas moins de son attachement, mais le plaisir que j'en éprouve n'est pas sans mélange. Il m'est pénible de penser que mon meilleur ami ait pu croire que j'avais eu assez peu de prévoyance pour laisser ton sort, pour laisser tout ton avenir à la merci d'un caprice ministériel. J'ai été traité durant ma longue carrière comme je pouvais le désirer. Je ne veux pas qu'après ma mort personne puisse dire que la veuve de Legendre est à la charge du pays." Ces nobles paroles étaient à l'adresse d'un homme digne de les comprendre. On a vu plus haut quel exemplaire usage Mme Legendre sut faire de la petite fortune laissée par son mari.
Legendre a marqué ses travaux dans la géométrie d'une empreinte si féconde et si originale, que, depuis deux mille ans, cette branche des mathématiques n'avait rien reçu de pareil jusqu'en 1785. Il suffit du passage d'un homme de génie pour éclairer tout d'un coup d'un jour éclatant les points les plus obscurs de la science. La géométrie n'est devenue populaire que depuis les découvertes de ce profond esprit, dont l'action a été immédiate et s'est répandue dans le monde entier. La ville de Paris a donné le nom de Legendre à une de ses rues de la rive droite de la Seine. Le portrait ci-dessus a été donné par Legendre à Arago, en 1829.
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